Le 27 janvier dernier, au terme d’une nuit où elle avait échappé à la surveillance de son entourage, Laura Smet était interpellée par la police. Tout le monde s’est inquiété. Laura, rattrapée par ses vieux démons? Décidée à reprendre sa vie et sa carrière en main, la jeune femme livre sa version des faits…
Laura Smet, l’imprévisible. Silence, moteur, cette fois, on la refait… avec le sourire, s’il vous plaît. Deux mois après avoir été l’héroïne d’une nuit digne d’un scénario de David Lynch ou d’Abel Ferrara, entre bruissements de robes de cocktail, vapeurs d’alcool, rencontres toxiques et réveil cauchemardesque, la jeune femme de vingt-huit ans, évaporée dans la nature et insaisissable par sa propre famille depuis ce funeste Dîner de la Mode du 26 janvier, a redonné signe de vie.
«C’était des conneries. Pour vous dire la vérité, on avait mis un truc dans mon verre, la drogue du violeur. Je le sais parce qu’on a fait des analyses le lendemain. Je ne me souviens de rien, mais cela m’a mis dans une situation… embarrassante. Mais je n’étais pas saoule à poil dans la rue. Voilà. Maintenant, tout est réglé et je suis en pleine forme.» Le débit est rapide, le discours ne s’embarrasse pas de formules alambiquées, on dirait presque une impro… En plein tournage du clip de Mon premier amour du chanteur Philippe Uminski, Laura jette sa vérité, comme son personnage balance son bouquet de future mariée pour retrouver son émoi de jeunesse. Peu importe qu’une source policière ait indiqué à l’AFP, le 27 janvier, que la jeune femme fut bien interpellée «nue en bas de chez elle et fortement alcoolisée», sur les coups de 8 heures 30. Peu importe qu’il lui faudra peut-être, tôt ou tard, prouver l’existence de ces fameuses analyses aux yeux de ceux bousculés par son indomptable nature. Cherchant sa propre couleur durant «une enfance en noir et blanc», entre sa mère, Nathalie Baye, cultivant la discrétion dans la Creuse, et son père, Johnny Hallyday, brûlant ses étés à Saint-Tropez, Laura a quitté l’école, ce monde de savoirs dont les impatients n’ont que faire, à seize ans.
Mais sa connaissance de la philosophie de Nietzsche est empirique. Laura trébuche, mais ce qui ne la tue pas semble la rendre plus forte. Laura est jusqu’au-boutiste, mais elle revient toujours de ses errances, c’est son «éternel retour». Ce qui est fait est fait, chaque jour est un nouveau départ, no regrets. Rien ne la ligote à la raison qui entretient petit confort et gros complexes. Nathalie Baye a bien essayé de lui assurer l’escorte d’anges gardiens, Laeticia et Johnny Hallyday, eux, ont bien tenté d’éclaircir ses idées sombres sous le soleil de Californie, fin janvier encore… En vain.
Avec elle, tout peut chavirer pour le meilleur comme pour le pire, à la dernière seconde, pour preuve cette nuit du 26 janvier. Laura n’est pas plus contrôlable que ses désirs. Laura veut vivre pleinement, même si ça fait mal, même si sa fragilité assumée n’attire pas les âmes les plus bienveillantes. De sa mère, disciplinée par des années de danse classique, elle a appris à transcender la douleur. De son père, véritable phénix de la variété française, elle sait aussi qu’un artiste se nourrit de ce qui le détruit, que sa légende se brode de lumière et d’ombres, de faits de gloire comme de faits divers. Elle est d’ailleurs pleine d’admiration et de tendresse pour Patrick Dewaere et Marilyn Monroe, deux monstres sacrés au mal de vivre aussi corosif que leur talent.
Elle dit voir en eux une force comique insoupçonnée. Préposée aux rôles dramatiques depuis son incandescente interprétation d’une jeune cancéreuse dans Les corps impatients, son premier film en 2003, Laura rêve, elle-même, de révéler son côté lumineux dans une comédie sentimentale comme L’Arnacœur. Elle tient sans doute le bon projet: en septembre, selon ses dires, elle doit entamer le tournage d’une comédie romantique de Renaud Bertrand avec Gaspard Ulliel. Enfin, si son horizon, qu’elle tient dégagé pour l’instant, ne s’obscurcit pas d’ici là…
Subjugués par ce diamant brut de comédienne, épargné par le polissage intensif d’un cours de théâtre et les mauvaises habitudes de l’école du narcissisme, des professionnels de l’industrie cinéma-tographique continuent de lui faire confiance. Mais sa filmographie aura –hélas– été trop dépendante de ses états de fatigue mentale, ces dernières années. Quand Frédéric Beigbeder, l’écrivain dandy avec qui elle expérimentait la magie noire de la nuit, la quitte en octobre 2006, après deux ans de passion, Laura tire le rideau. A l’affiche du film UV, elle n’en assure pas la promo. On l’attendait sur les planches, Virginie Ledoyen la remplace dans la pièce, Irrésistible. Elle a entamé le tournage du drame historique, Les femmes de l’ombre, Marie Gillain le termine à sa place. «Ennuis de santé et de surmenage», assure son entourage, sans rentrer dans les détails de ses séjours en centre hospitalier. Laura revient jouer les stars suicidaires dans La frontière de l’aube, de Philippe Garrel, en 2008. Excellente catharsis, sur le papier. Film obsédant, qui réveille plus qu’il n’endort ses démons, dans la réalité.
Fin 2009, Johnny est dans le coma. Accompagnée de Nathalie Baye, sa fille accourt à son chevet, à L.A. Les flashs crépitent, les faux amis prennent toute la place dans les médias. Bousculée, Laura vacille. En janvier 2010, après un mauvais mélange d’alcool et de médicaments, elle est admise au Val-de-Grâce. Son frère aîné, David, la prend sous son aile. Ils chantent ensemble On se fait peur, aux NRJ Music Awards. Héroïne de Insoupçonnable et Pauline et François au cinéma, la jeune femme fait son mea culpa. Il faut qu’elle reste occupée. Elle ne supporte pas d’être livrée à elle-même. En ce printemps 2010, Laura a des projets, l’humeur est radieuse. La prise est bonne. Pas besoin de la rejouer, version tragique, Laura…
Paru dans Gala en mars 2012